Ils sont là, pépères, écroulés devant le poste, doigts de pieds en éventail, à mater les nouvelle aventures de « Derrick à la plage ». Et moi, pauvre Minette, je n’aurais pas l’droit de participer à la fête?
– « Dégage, t’es trop grosse », se moque Grand-Asperge
– « Et t’es pas transparente », surenchérit aussitôt Mouchodoit.
Alors, voilà: parce que je suis un chat, je n’aurais pas accès aux merveilles de la boite à images, à tous ces programmes épatants et pédagogiques ? ces merveilleuses émissions où se débattent ces pauvres bêtes à deux pattes. C’est quand même dingue cet ostracisme. Et inquiétant de constater la progression de cette xénophobie rampante. Aujourd’hui les matous… Et demain ?
C’est bien les zumains, ça: plaider pour de grandes idées humanistes et généreuses mais qu’ils sont incapables de s’appliquer.
Oh mais, je les entends bien qui pestent et grommelent dans mon dos. Qui m’exhortent à partir en invoquant des noms d’oiseaux. Si je dérange, dites le tout de suite ! Je ne serais même pas surprise que l’un d’eux s’abaisse à m’envoyer une savate ou quelque projectile.
Et tout ça parce que je suis DEVANT l’écran.
Enfin, ne suis-je pas plus sexy que ce vieux Derrick ? Comme s’il n’y avait rien de plus grave au monde.
Vous confierais-je ici, mes soupçons d’une potentielle myopie qui m’oblige à coller mon museau sur l’écran pour voir bouger les images. Même à 20 cm du tube, ce brave inspecteur continue de m’apparaitre flou et indéfini… avec quelques reflets verdâtres qui rappellent ces traces de moisi que je découvre parfois sur la palissade du jardin. Un vrai délice !
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On m’a volé mes crottes
On m’a encore volé mes petites crottes.
Je les avais enfouies ici… à quelques centimètres à peine de profondeur. Et lorsque je suis revenue, elles avaient disparu. Oh, c’est qu’on ne me la fait pas, j’ai le nez pour ça et je sais reconnaitre un caca présent d’un caca absent, faut pas me prendre pour plus bête que je ne suis.
Ce n’est pas la première fois que cela se produit et, au début, je croyais naïvement qu’elles se dissolvaient toutes seules dans le sable de ma litière, « comme elles le font dans leur milieu naturel », m’expliquait ma môman. Mais mon sable n’avait plus ce doux parfum faisandé qui, par beau temps, développe de subtiles fragrances dans toute la cuisine. Pis, il avait cette odeur aseptisée des produits synthétiques. Et je soupçonnais depuis quelque temps que mes deux zumains ne devaient pas être étrangers à cette affaire. Mais, sans preuves, que voulez-vous que je dise ?
Je me décidais donc à surveiller, dussé-je prendre sur mon temps de sieste ou mon temps de repas. Quoique non, pas le temps de sieste.
Et puis, je l’ai vu !
Grand-Asperge en personne, avec sa petite pelle, en train de se servir dans MON bac à caca, de me dérober mes plus beaux colombins pour les enfouir dans un grand sac en plastique noir qu’il déposera ce soir, sur le bord du trottoir. Cruelle déception. Depuis si longtemps que nous vivons ensemble, je ne l’imaginais pas capable d’une telle duplicité.
J’ignore s’il en fait commerce ou si c’est un collectionneur. Y a t il un marché de l’étron mondial où l’on spéculerait sur la valeur des bousins? Quel odieux trafic en fait-il ? Autant de questions auxquelles je vais, bien chiure, m’appliquer à trouver réponses car il est un fait indéniable: mes coprolithes partent vers une destination inconnue.
Et par les saintes fientes du Grand Moustachu, Krevette va mener l’enquête
PS: Je ne manquerai pas de vous en tenir informé(e/s)
Cékankon sort ?
Ça fait déjà un bail que ça m’démange les coussinets!
L’extérieur, je ne le vois que de ce coté-ci de la fenêtre. Coté cour ou coté jardin, toujours le même espoir brisé, le même rêve d’évasion envolé. Je suis une princesse prisonnière tout en haut de sa tour d’ivoire.
Il fut un temps pourtant, où j’avais droit au jardin. Certes pas bien grand mais suffisant pour y promener mes douces pattes et essayer mes crocs sur le tronc du rosier.
Mais on parle de travaux, du voisin en chantier et de trous dans tous les murs. Et ce prétexte suffit à me cantonner dans mes appartements sans pouvoir mettre un bout de moustache dehors. Tout ça ressemble très fort à un durcissement des mesures sécuritaires que je trouve particulièrement inquiétant. Prisonnière donc de l’avancée des travaux, j’attends cet heureux jour où je pourrait enfin me dorer la pilule à la lueur d’un rayon et cavaler dans les hautes herbes
La dictature du moment réduit mes choix personnels.
Hélas, le zumain, dès qu’on lui lâche un peu de pouvoir s’en enivre aussitôt et devient un monstre d’autoritarisme, comme s’il avait quelques frustrations en réserve qui commandent ses actes.
Et il n’est malheureusement pas rare d’en voir parvenir au sommet bardé de bons sentiments pour, une fois en place, appliquer tout l’inverse. Et ça prétend gouverner un état quand ça arrive à peine à administrer une ville?
A-t-on déjà vu quelque seigneur matou revendiquer territoire aussi grand? Non, bien sur, cela consisterait à péter plus haut que son cul. Que nous avons fort bas… pour mieux se le renifler !
Mes zumains
Ça me fait drôle de dire « mes zumains », tant je n’ai pas vraiment le sentiment qu’ils m’appartiennent. Je ne suis pas de ces animaux méprisants qui considèrent les autres espèces animales comme forcément inférieures. Certes, le zumain -malgré ce que son nom indique- manque singulièrement de numanité, mais, il mérite quand même, sinon notre estime, au moins notre respect. Comme tout être vivant.
Pour ma part, je me refuse à être leur maître et je n’ai pas adopté des zumains juste pour qu’il remuent mon bouchon ou qu’ils remplissent ma gamelle. Nous vivons davantage une sorte de cohabitation -en bonne intelligence- plutôt qu’une adoption au sens où l’entendent généralement, heu… enfin, ceux qui en parlent, quoi !
De plus, je les laisse totalement libres de leurs mouvements et il leur arrive d’ailleurs très fréquemment de quitter la maison. Parfois même plusieurs jours. Sans donner de nouvelles. Certes, je m’inquiète quelque peu, mais je sais que ce sont les petites peines passagères que je dois accepter, si je veux aussi avoir le bonheur de les voir gambader dans le salon où s’avachir mollement devant la télévision bière à la main. Ah les joies de la chaternité !
En toute franchise, je n’aurai pas songé de moi-même à me procurer des zumains (je craignais surtout leur entretien), mais, maintenant qu’ils sont là, j’en suis très satisfaite.
Je n’ignore pas que, livrés à eux-mêmes, en pleine nature, ils seraient probablement voués à une mort certaine et il m’appartient de veiller sur eux. Ils ont perdu leur instinct animal et, ne sachant surement plus chasser sans ses chiens, ils seraient à la merci du premier prédateur venu.
De grâce, amis matous, il faut cesser de considérer nos frères humains comme de simples objets ou de vulgaires garde-manger. L’homo-domesticus a droit à toute notre considération. Eux-mêmes pratiquent suffisamment la ségrégation dans leurs rangs pour que nous n’agissions de même. Montrons-nous plus civilisés!
J’Veux mon bouchon !
C’est dingue ça, faut que je l’oblige à jouer avec moi. Sinon, de lui-même, il n’y pense pas. Trop occupé à ses petits dessins, à écrire ses histoires à la gomme que personne ne lit. C’est le genre de personnage qui préfère son bricolage à mon indispensable Espace de Jeu Quotidien.
« Une heure de jeu par jour », c’est pas moi, c’est le véto qui l’a dit. Alors bon, j’irais pas forcément fayoter mais faudrait quand même faire un petit effort. J’ai ouïe dire que la SPA surveillait sérieusement les petits chats.
(…) Et me voilà obligée de monter sur son bureau, me coucher sur son clavier, lui chiper gommes et stylo pour le faire réagir. Tiens, un petit coup de griffe sur le tapis à souris, c’est mou, c’est doux, c’est rigolo. Oh, il est joli ce feutre. Un feutre, ça serait vraiment chouette dans ma collec’… tiens, viens donc par ici… Mais, oh… c’est pas cool, IL me l’a encore repris. Bon, et si je saute à pieds joints sur le clavier, il va peut-être comprendre ?
(…) Ah, le bouchon, quelle belle invention. Et que de plaisirs évoqués en ton nom. C’est qu’à ce jeu, je suis devenue une championne. Faut voir mes sauts, les amis, je dépasse le mètre. Et avec galipettes en vol !
Bon, Grand-Asperge qu’a toujours pas fait le deuil de son Kahuète prétend que c’était un vrai acrobate qui faisait des figures étonnantes… jusqu’au double salto arrière. Évidemment, il n’a pas de photo, faut que je le croie sur parole. Mais, je sens bien qu’il dit tout ça pour me mettre la pression.
… avant les prochains jeux olympiques ou je serais inscrite dans la section « Jeune espoir féliminin »
En créant le Chat, le Grand Moustachu a également crée l’indispensable bouchon, son fidèle compagnon. C’est bien la preuve que tout se tient et que Grand-Moustachu est Grand et pas seulement de Nom.
Ce qu’il a d’étonnant ce bouchon c’est cette facilité qu’il a, au moment où je vais m’en saisir, à se dérober subitement pour réapparaitre dans mon dos. Oh, je sais bien qu’il est de mèche avec Grand-Asperge et qu’ils ont mis au point un stratagème pour parvenir à ce résultat mais c’est plus fort que moi: dès que le bouchon danse, faut que je l’attrape.
(…) Maintenant, je vois bien qu’il tient la ficelle d’une main molle tandis que, de l’autre, il griffonne je ne sais quelles idioties. peut-être même écrit-il sur moi
En tous cas, j’aime pas quand il n’est pas à son affaire. Soyons honnête, quand ça pendouille tristounet et sans rythme, ça n’invite pas à la sauterie.
– – – – – – – – – – –
Pour le bicentenaire de Jean-Baptiste Bouchon, j’ai écrit ce petit poème:
ODE AU BOUCHON
Ô bouchon, si géniale invention
que de plaisirs évoqués en ton nom
que de jolis sauts, de merveilleux bonds
pour la seule joie de te mordre Bouchon !
(PS: je débute en poésie)
Mes zumains
Ça me fait drôle de dire « mes zumains », tant je n’ai pas vraiment le sentiment qu’ils m’appartiennent. Oh, je ne suis pas de ces animaux méprisants qui considèrent les autres espèces animales comme forcément inférieures. Certes, le zumain, malgré son appellation manque singulièrement de numanité mais il mérite quand même sinon notre estime, au moins notre respect.
Pour ma part, je me refuse à être leur « maître » et nous vivons davantage une sorte de cohabitation plutôt qu’une adoption au sens où l’entendent généralement heu… ceux qui en parlent, quoi !
De plus, je les laisse totalement libres de leurs mouvements, il leur arrive d’ailleurs très fréquemment de quitter la maison. Parfois même plusieurs jours. Sans donner de nouvelles. Mais je sais que ce sont les petites peines que je dois accepter si je veux aussi avoir le bonheur de les voir gambader dans le salon où s’avachir mollement devant la télévision bière à la main. Ah les joies de la chaternité !
En toute franchise, de moi je n’y aurai pas songé mais, maintenant qu’ils sont là, je suis très contente de mes zumains.
Je n’ignore pas que, livrés à eux-mêmes, en pleine nature, ils seraient surement voués à une mort certaine. Ils ont perdu leur instinct animal et, ne sachant surement plus chasser sans son chien, seraient à la merci du premier prédateur venu.
Il faut cesser de considérer nos frères humains comme de simples objets ou de vulgaires garde-manger. L’homo-domesticus a droit à toute notre considération. Eux-mêmes pratiquent suffisamment la ségrégation entre eux pour que nous n’agissions de même. Montrons-nous plus civilisés
Sécuriser le jardin ?
C’EST QUAND QU’ON SORT ?
Ça fait déjà un bail que ça me démange les coussinets !
L’extérieur, je ne le vois que de ce coté-ci de la fenêtre. Coté cour ou coté jardin, toujours le même espoir brisé, le même rêve d’évasion envolé. Je suis une princesse prisonnière tout en haut de sa tour d’ivoire.
Il fut un temps pourtant, où j’avais droit au jardin. Certes pas bien grand mais suffisant pour y promener mes douces pattes et essayer mes crocs sur le tronc du rosier. Mais on parle de travaux, du voisin en chantier et de trous dans tous les murs. Et ce prétexte suffit à me cantonner dans mes appartements sans pouvoir mettre un bout de moustache dehors. Tout ça ressemble très fort à un durcissement des mesures sécuritaires que je trouve particulièrement inquiétant. Prisonnière donc de l’avancée des travaux, j’attends cet heureux jour où je pourrait enfin me dorer la pilule à la lueur d’un rayon et cavaler dans les hautes herbes
La dictature du moment réduit mes choix personnels.
Hélas, le zumain, dès qu’on lui lâche un peu de pouvoir s’en enivre aussitôt et devient un monstre d’autoritarisme.
Et il n’est malheureusement pas rare d’en voir parvenir au sommet bardé de bons sentiments pour, une fois en place, appliquer tout l’inverse. Et ça prétend gouverner tout un état quand ça arrive à peine à administrer une ville ?
A-t-on déjà vu quelque seigneur matou revendiquer territoire aussi grand ? Non, bien sur, cela consisterait à péter plus haut que son cul. Que nous avons fort bas en vérité… pour mieux se le renifler !
Mon coté Marilyn
Ne vous méprenez pas, ce n’est pas pour vamper mes fans qui connaissent déjà mon incroyable séduction naturelle, c’est juste que je fais un stage de Reterritorialisation Olfactive Appliquée. Bon, je vous passe le jargon technique qui risque de vous perdre…
En clair, il s’agit de déposer délicatement ses odeurs pour marquer son territoire. Un peu comme si mon zumain pissait sur les draps pour signifier que c’est son lit. Personnellement, je trouve cette coutume très charmante et je m’étonne que -pour une fois- les zoms ne nous ait pas copié notre système de géolocalisation. Cela éviterait pourtant bien des guerres puisqu’il leur suffirait de faire pipi sur les frontières pour que chacun s’y reconnaisse.
Attention, il s’agit d’une opération beaucoup plus délicate qu’il n’y parait puisqu’il s’agit de ne pas mélanger les fragrances. Et le frottage requiert une gymnastique très particulière. Enfin, je viens de démarrer la formation. Je vous en reparlerai d’ici quinze jours, quand on me délivrera mon diplôme.
Certains ont un chat…
Certains prennent un chat parce qu’ils ne peuvent pas avoir de bébé, d’autres parce que c’est le cadeau le plus original qu’ils ont trouvé pour le noël de leur gosse, d’autres enfin pour qui la pauvre bête sert d’alibi permanent. Je crains d’appartenir à cette troisième catégorie.
Dès qu’ils perdent quelque chose, au moindre objet égaré, c’est comme une litanie dans la maison: « Crevette, qu’as tu fait de mon stylo ? », « Crevette où est ma gomme? », « …Qui a bouffé mon cahier ? »
Enfin, vous voyez le genre!
À la limite, je trouve ça un peu humiliant cette suspicion permanente. Un peu facile de tout me mettre sur le dos au lieu d’admettre qu’ils n’arrêtent pas de perdre leurs affaires.
Et tout ça pourquoi?
Parce que, faut pas croire, j’ai mon petit trésor, moi:
– Trois stylos à bille bleu, un stylo à bille noir, trois crayons HB, quatre bouts de gomme, huit pinces à linge, deux billes, une boulette de papier froissé et un morceau de je-sais-même-pas-ce-que-c’est
Voilà pour l’inventaire de mon petit magot.
Mais, je tiens à préciser que tout ceci m’appartient de façon le plus légal. Ce sont des butins de guerre, des prises effectuées au cours d’audacieuses campagnes de guérillas en milieu domestique. J’ai pris de terribles risques pour les obtenir, n’hésitant pas à monter sur la table ou à fouiller dans les placards.
Alors si vous aviez le moindre lien de parenté avec l’un de ces objets, considérez-vous comme définitivement orphelin. Oui, je sais, je sais ce que vous allez me dire: « C’était un cadeau de ma grand mère… c’est avant tout sentimental » Et je compatirais sincèrement à votre petit malheur mais, que voulez-vous, la vie est dure. Et, pour tout dire, moi-même ne m’a-t-on pas enlevée à ma famille alors que je n’étais qu’une fragile enfant? Qui sait si, privée de la sorte du sein maternel je n’ai pas développé une psychose ultra-utérine à tendance pathogène. Parce que c’est bien connu que « là où ça pathogène, y a pas de plaisir »
Ticket de sortie
ÇA Y EST, J’AI COMPRIS !!!
Ce petit bout de lanière bleue dont ils veulent absolument m’affubler -et qui m’insupporte au plus haut point- s’appelle en fait un « Narnais« . C’est, j’ai bien cru le deviner, la condition sinon quoi naine (1) pour qu’on m’ouvre la porte. Il doit exister un mécanisme caché qui unit les deux et je n’ai pas encore saisi toute la logique du processus mais il me faut bien accepter ce costume ridicule pour que l’ensemble fonctionne. Ça oui, j’ai capté !
Et ce n’est pas de gaité de cœur, je dois l’avouer tant je trouve ça affreusement laid et, pis encore, visiblement trop grand pour moi. Oh, je dirais, facilement une ou deux tailles au-dessus et ce qui devrait me maintenir délicatement la poitrine (que j’ai délicieusement naissante) me tombe lourdement sur les hanches (que j’ai agréablement fines), ce qui est une hérésie en regard des diktats de la Mode Contemporaine et des exigences vestimentaires relatives à la condition féline. Une sorte de string en somme puisqu’il y a plus de ficelle que de tissu. Me prendrait-on pour une allumeuse?
Oh j’ai bien, aux fins fonds de mes tiroirs, une série de photographies où on me voit parée de cet accoutrement grotesque mais je n’ose vous les présenter tant je m’y trouve à mon désavantage. (2) Non mais faut voir le look que je me tape avec ce machin, franchement les copines, ça craint grave !
Néanmoins, ce narnais (disais-je ?) constitue la première étape de l’opération « Droit de Sortie ».
Un chainon essentiel puisque c’est là-dessus que s’accroche une autre lanière, bleue également mais nettement plus longue, elle-même fixée par son autre extrémité à un boude ficelle, noire cette fois, et qui se noue, à son tour, à un petit fil de fer qui -enfin- se suspend au crochet de la porte. Bref, un truc qui, quand ils se tiennent tous par la main et s’étirent chacun de tout leur long, parvient à une longueur suffisamment importante pour dégourdir mes petites pattes et venir renifler jusqu’à la fenêtre du voisin. Une distance appréciable pour une toute première sortie, j’en conviens.
Oh non, je ne suis pas une aventurière, c’est un fait mais ce n’est pas une raison pour me traiter de pleutre et de pétocharde comme le fait Grand-Asperge en se bidonnant grassement. Je me qualifierai plutôt de prudente et mesurée. Je sais me contenter de mon petit bout de paillasson où je demeure de longues minutes quasiment immobiles, juste à laisser frémir mes moustaches au fil de cette douce brise d’hiver. Sous cette apparente immobilité, je n’ignore pas que les passants -et d’éventuels prédateurs- me prennent pour une statue, ce qui me permet d’étudier le terrain à mon aise et de préparer mes prochains plans d’évasion. Car, vous l’aviez compris, je compte bien profiter de cette occasion pour… mais, je vous en reparlerai.
Pour le moment, toute à ma concentration, j’observe l’extérieur pour la toute première fois et ça ressemble assez fidèlement, à ce que j’en percevais de l’autre coté de la fenêtre. Sans les traces de doigts.
Et voyez comme cette pression de neurones à froid est efficace: je commence à piger. Il y a ce grand ruban gris au milieu qui semble être l’espace où circulent ces grosses machines dont j’ai parlé plus haut (pour simplifier, appelons-les « Grosses Machines »)
Mais, sur les bords dudit ruban, des espaces plus petits et plus clairs, recouverts par endroits d’une maigre verdure, où je peux être en sécurité, à la condition que je me tasse et me pelotonne le plus possible pour que les Grosses Machines ne me voient pas quand elles passent à toute allure en vrombissant.
J’y ai découvert ça et là quelques petites crottes qui me laissent à penser qu’il doit y avoir une (sinon plusieurs) présence(s) animales dans le secteur. Par commodité, je nommerai donc ces bords de route des Crottoirs.
Le plus embêtant, ce sont ces gros engins qui passent en poussant leurs affreux rugissements. « Comme un bruit de moteur », vous expliqueront ces spécialistes qui adorent étaler leur science pour épater la galerie. Du genre Grand-Asperge qui ne perd jamais une occasion de ramener sa fraise.
Il a tiré sa chaise dans la rue. Il fait semblant d’écrire mais je sais bien qu’il me surveille. Comme si j’allais me débiner alors que je connais même pas le quartier, comme s’il craignait un accident. Oh, j’ai très bien compris que tout ton assemblage et tes roclites de ficelles limitaient ma marge d’expansion. Je crois qu’ils ont une zapette, j’essaierai de changer de chaine à l’occasion. Pour le moment, je profite de mes tous premiers instants de liberté.
Hélas, tout ceci n’a qu’un temps et mon zumain a profité que je sois rentrée pour refermer la porte subrepticement.
D’ailleurs, je ne suis pas certaine que ce soit si subreptice puisque j’avais le dos tourné mais je trouve ce mot tellement joli que je ne voulais pas louper une occasion de le placer. Ceci fait, m’ayant privé de mon complément d’évasion, Grand-Asperge a passé plus de vingt minutes à défaire tous les noeuds qui me maintenaient prisonnière à la table de cuisine. Quand je vous disais les esprits tordus et tortueux de Fil Defer et Boude Ficelle.
ET MAINTENANT ?
(…) C’est malin, maintenant, je reste de longues heures le museau collé à la fenêtre à regarder dehors. Je pense que je ressens déjà le manque de cette liberté toute nouvelle. Et cette sensation me devient parfois si insupportable que je me surprends à chouiner derrière la porte, moi qui me faisait un honneur de ne jamais émettre le moindre miaulement. C’est comme une obsession, une idée fixe qui ne cesse de me poursuivre: cette image de verdure et de brise mêlées me manque. Serais-je tombé sans m’en rendre compte dans les affres de la drogue ?
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(*) NOTA:
(1): Je ne sais pas vraiment ce que signifient ces mots. Il s’agit d’une locution latine de l’époque des chats romains, qui veut dire un truc du genre que t’as pas le choix
(2) Ou alors, seulement si vous insistez !